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reportages

d

ici

et

ailleurs

|

le

transsibérien

slaves dans leur volonté de paraître. Aux abords d’un parc

d’attractions de “UB”, le petit nom branché et à l’américaine

donné à la ville (à prononcer “youbi”), des jeunes dansent

la salsa en plein air en sirotant des mojitos… Les familles

déambulent dans le centre-ville et les Mongols aux visages

marqués par la misère ou l’alcool se font beaucoup plus rares

qu’il y a quelques années. Un changement que confirme

Orkhon, notre guide, un jeune Mongol qui a passé quelques

années en France.

C’est la magie d’un voyage en Transsibérien : à un peu plus

d’une heure de la gare, on peut se retrouver en plein cœur

des steppes mongoles, entouré de sommets tour à tour pelés

ou arborés, au milieu des chevaux et des yourtes de pay-

sans. La découverte de cette Mongolie sauvage, notamment

en visitant le parc national de Terelj, est sans aucun doute

le moment le plus marquant pour la plupart des passagers

du “Transsib”. Il y a quelques heures encore, je rêvassais

en regardant les milliers de kilomètres se cumuler derrière

la vitre du train et je m’apprête déjà à chevaucher un petit

cheval mongol, au milieu d’une nature splendide. Le paysan

qui nous a apporté les chevaux au bord de la route découvre

une dentition parcellaire en s’amusant de ma peur du cheval.

Pour un Mongol, avoir peur du cheval équivaut à avoir peur

du ciel ou des étoiles. Ils vivent avec depuis la plus tendre

enfance et apprennent à les monter dès l’âge de 3 ans. Si

un enfant mongol le fait… J’enfourche donc mon canasson

sous le regard goguenard du cameraman qui m’accompagne.

Après avoir fait promettre à mes camarades que nous ne pas-

serions pas le cap du trot, je vois un galop en règle s’annoncer

dans leurs sourires. Mon cheval s’élance et je dois me faire

une raison, à défaut de quoi je perds ma place sur la selle. Je

m’accroche donc et perçois un début de plaisir à entendre

le bruit des sabots sur le sol spongieux et à voir les collines

mongoles défiler à ma gauche. Le coup est pris et je peine à

masquer un sourire béat lorsque nous calmons le train pour

traverser plusieurs rivières et gagner un petit hameau. La ma-

gie opère et c’est en Mongolie, s’il vous plaît, que je me suis

réconcilié avec les plaisirs équestres. Nous sommes invités

par un paysan à entrer dans la yourte familiale. Ici, l’hospi-

talité ne se refuse jamais car, avec la densité de population la

plus faible au monde et un climat d’une rigueur extrême, la

Mongolie est un piège fatal pour le voyageur esseulé. Assis

sur les bancs de couleur, pendant que sa femme prépare le

traditionnel thé au lait de jument, notre hôte au regard clair

et à la peau burinée répond poliment à nos questions. Je lui

demande s’il habite en yourte depuis toujours. “Non, autre-

fois j’étais garagiste à Oulan-Bator, mais à la retraite, j’ai pré-

féré revenir vivre en yourte dans la nature, comme dans mon

enfance, c’est ici que je me sens le mieux.” Il y a donc bien

des anciens ayant connu le confort qui reviennent par choix

vivre au milieu des steppes, dans un dénuement apparent qui

dissimule en réalité des trésors d’intelligence et d’adaptation

UNE AMBASSADE BRETONNE

À ULAN-BAATOR

C’est désormais une tradition, initiée

lors du grand raid Brest-Qingdao : la

première visite à Oulan-Bator se fait

au restaurant

LeTriskell,

tenu par Yan-

nick Queginer, un Breton originaire de

la région de Lannion qui a travaillé dans

une “centaine de pays”. Véritable figure

locale, cet ancien directeur commer-

cial d’Alcatel est installé en Mongolie

depuis le milieu des années 1990.

LeTris-

kell,

son restaurant crêperie qui sert de

l’andouille de Guéméné en apéritif, est

fréquenté pour moitié par des Mongols

et par les étrangers installés dans la

capitale. “Je dis souvent que les Mongols

sont un peu comme les Bretons, assez

froids et plutôt fiers au début. Il faut

savoir gagner leur confiance et beau-

coup de temps avant de se faire inviter

chez eux. Ici, il y a beaucoup de règles de

politesse et un vrai respect des anciens.

Mais au bout de quelques années, j’ai

été adopté par les Mongols.” En servant

un verre de chouchen, Yannick nous

parle de la Mongolie d’aujourd’hui  : un

pays en pleine modernisation mais dont

l’essor fulgurant s’est heurté à la crise,

comme dans la Chine voisine. “Ici ce sont

les mines et le tourisme qui font tourner

l’économie. Depuis trois ans, la chute du

cours des matières premières a frappé

tout un secteur, les familles, les cadres

et ouvriers étrangers et beaucoup d’in-

vestisseurs ont quitté le pays, explique

le patron du

Triskell.

L’économie est fra-

gilisée.” Mais l’optimisme du Trégorrois

reprend vite le dessus. “C’est un pays

magnifique, plein de ressources mais

qui a besoin de savoir-faire extérieur.

De nouveaux accords ont été signés

avec des entreprises étrangères et je

pense que les étrangers vont revenir.

J’ai monté le

Triskell

car il n’y avait pas

de restaurant crêperie en Mongolie.

Les Mongols ne connaissaient pas les

crêpes mais ils aiment bien le cidre, ils en

avaient du temps des Russes.”

Yannick Queguiner, le patron du restaurant Le Triskell à Oulan-Bator et Yann Rivallain

évoquent la Mongolie, lors du tournage d’un film documentaire sur le Transsibérien

produit par Salaün Holidays à paraître en 2017.