Salaün
Magazine
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Aujourd’hui, nous avons effectué notre dernière longue étape du raid :
620 kilomètres au cœur de la Mongolie, de Altaï à Arvaikheer. 620 kilo-
mètres dont plus de 500 sur de la piste. Sans savoir vraiment où l’on
va, en suivant, de plus ou moins près, une ligne électrique qui se perd
derrrière une barrière montagneuse…Chaque kilomètre se mérite, use
les nerfs et les voitures. Mais quelle beauté ! On a l’impression que la
Nature s’est employée à montrer tout ce qu’elle savait faire, dans une
sorte de désordre géologique qui ne cesse d’étonner. Aucune montagne
ne ressemble à une autre. Vous pouvez passer d’un massif épineux et
aride à des collines d’où émergent des rochers ronds comme des galets,
et à un désert qui nous rappelle que nous flirtons avec celui de Gobi
dans lequel nous rentrerons après-demain. C’est une journée entière
de spectacle époustouflant que nous offre la Mongolie. Avec comme
distraction, une tentative d’explication de la politique routière du pays.
En se demandant si un jour, il arriverons à rabouter tous les petits bouts
de route qu’ils construisent ici et là ! Mais faire 600 kilomètres dans le
désert, sans route définie et sans un seul panneau vous rassurant sur
votre chemin est un plaisir rare !
Pour nous, la route d’Ulan-Bator s’arrêtait, le temps d’une étape,
à Kogno Kahaan. Ce n’est pas une ville, pas même un village. Juste
un simple camp de yourtes, niché au creux d’un cirque creusé dans la
montagne. Superbe. Un massif schisteux, sombre, protégeant comme
une mère un plateau de terre rouge, couvert d’une herbe tendre que
parfument de jeunes pousses de thym. Nous avons à peine le temps de
prendre possession de nos yourtes respectives et de nous retrouver dans
la grande salle qui sert de restaurant qu’un déluge dégringole sur notre
camp. Il pleut comme yack qui pisse. La soirée ne va pas s’éterniser.
Nous n’avons le droit qu’à deux heures d’électricité. Une précarité dont
on s’accommode fort bien. Car c’est un moment de pur bonheur que
d’entendre, bien au chaud sous la couette qui sent encore la brebis, la
pluie tomber sur l’épaisse toile de la yourte.
Ulan-Bator. L’entrée dans la capitale de la Mongolie est invraisemblable.
Dès les premiers faubourgs de la ville, le bitume s’arrête pour céder la
place à un bourbier. C’est Verdun ! En attendant que la nouvelle route
en cours de travaux soit mise en service, voitures et camions se dé-
brouillent comme ils peuvent pour trouver un chemin plus qu’incertain.
A un moment, il faut même passer par une station service ! Après les
travaux, c’est avec les embouteillages qu’il faut composer. Et aussi avec
la conduite urbaine acrobatique et imprévisible des automobilistes mon-
gols. Ici, ni gros mots ni injures ni invectives. Simplement un interminable
concert de klaxon. Mais ce ne sont que petits tracas. Pour l’instant, nous
avons décidé de faire un saut rapide en… Bretagne. Au restaurant « Le
Triskell » qu’un Finistérien, Yannick Quéguiner, a monté en plein centre
d’Ulan-Bator. Le patron n’est pas là : il a pris quelques jours de vacances
dans son Finistère natal. Mais le restaurant est ouvert. Il est même com-
plet. Un groupe d’une trentaine de personnes y déguste des crêpes au
froment dans une joyeuse ambiance. Venus pour la plupart de la région
de Besançon, ces Français effectuent un voyage en Transsibérien, que
leur ont organisé Salaün Holidays et Pouchkine Tours. Accompagnés par
Youri, le directeur russe de Pouchkine Tours à Moscou, ils ont découvert
le rythme du Transsibérien, Moscou, Irkoursk, le lac Baïkal et Ulan-Bator,
où ils ont fait une escale de trois jours. Demain matin, ils reprendront
le Transmongolien pour Pékin, leur destination finale. « C’est un voyage
extraordinaire, inoubliable », résume l’une des participantes, membre
comme les autres de l’association « Les pionniers ». Le temps de faire
une photo de groupe devant nos voitures et nous pouvons passer à table
goûter, enfin, aux fameuses crêpes de Yannick. Et, plus inattendu, à un
coulommiers fabriqué en Mongolie par Jacques Le Goff, un autre Breton
installé à Ulan Bator ! Le Triskell nous aura réservé une chaleureuse et
agréable parenthèse dans ce long voyage.
Extrait du carnet de route >>>>> >>>>> >>>>> 19-21 juin Arvaikheer - Mont Khogno Khaan - Ulan Bator
En haut de gauche à
droite, berger mongol
(1), traversée du désert
de Gobi (2), l’équipage
du Raid avec une famille
qui tient un campement
de yourte à Hovd (3), ren-
contre sur la piste (4).
4
En bas, la moto est avec
le cheval le moyen de
transport le plus usité
des nomades (5), aigles
et guerriers bretons en
tenue traditionnelle
mongole (6), le
monastère de Gandan,
au centre d’Ulan-Bator,
la capitale mongole (7).
7