7h30. Départ matinal pour une dernière étape de près de 900 kilomètres.
Les premières centaines de kilomètres traversent un paysage morne. Peu
à peu, au fur et à mesure que les troupeaux de moutons se font rares,
le sable pauvre se transforme en terres agricoles. Les bergers cèdent
la place aux paysans et aux maraîchers. A mi-route, nous faisons une
longue halte pour visiter les grottes d’Ulanqab. Un site exceptionnel
classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Sur une falaise de plusieurs
centaines de mètres de long, des grottes ont été creusées pour servir de
temples à Bouddha. Les statues sont gigantesques et d’une impression-
nante beauté. Les parois de ces temples troglodytes, datant de la pé-
riode des Ming, sont ornées de sculptures peintes. Nous prenons notre
déjeuner dans un quartier populaire d’Ulanqab. La ville n’est pas qu’un
musée. C’est aussi un grand centre minier où l’on extrait le charbon,
qui reste, largement, la principale source d’énergie de la Chine. Notre
dernière halte avant Pékin, alors que le ciel reste plombé et que le soir
tombe, se fera sur l’un des sites de la Muraille de Chine. A un endroit
où elle se transforme en forteresse pour défendre une vallée qui ouvrait
la route de Pékin aux envahisseurs potentiels. L’entrée dans la ville pro-
prement dite est éblouissante. Dans les deux sens du terme. Surtout à
nos yeux qui s’étaient accoutumés aux nuits sans électricité du désert
de Gobi. Ce soir-là, nous nous sentions un peu comme des nomades
mongols qui ne voyaient plus les étoiles. Celles de Pékin, articifielles,
éclairent un autre monde.
Le lendemain matin, la gigantesque place Tienanmen est écrasée de
soleil, ce qui ajoute encore au sentiment d’oppressant qu’elle dégage.
L’ensemble est impressionnant, les jardins sont tirés au cordeau et la
statue de Mao rappelle que si la Chine joue dans la cour des grands pays
capitalistes, elle ne renie en rien l’histoire qui la lie au Grand
Timonier. C’est encore son portrait qui orne l’entrée, à un
bout de la place, de la Cité interdite, celle par laquelle
on commence la visite de l’ancien palais des empe-
reurs de Chine. Son architecture est magnifique,
d’une géométrie et d’un équilibre parfaits qui
donne aux différentes forces de la nature leur
place. Il s’en dégage une sorte de sérénité,
malgré la foule énorme qui nous empêche, à
vrai dire, de nous laisser envoûter par la ma-
jesté du lieu. Le soir, nous retrouvons un peu de
calme dans un petit quartier situé juste derrière
notre hôtel. A l’ombre de sa grande façade, les
petites boutiques, les épiceries et les restaurants
bon marché survivent encore dans une joyeuse pagaille.
Avant, sans doute, d’être dévorés par les grandes tours qui les cernent
de plus en plus près.
1er Juillet 2012 : Nous avons bouclé les ultimes kilomètres des 19000
parcourus depuis Brest, pour rejoindre la « ville sœur » de Brest. C’est
aussi le moment des retrouvailles avec des amis qui sont venus à Qing-
dao nous attendre : Michel Salaün, qui a imaginé ce raid ; François Cuil-
landre, le maire de Brest, qui a su nous faire partager son attachement
à cette ville partenaire et qui nous a convaincus que c’était plutôt une
bonne idée d’en faire notre destination finale…Tout autour de nous,
c’est la ruée des journalistes qui représentent plus d’une demi-douzaine
d’organes de presse et de chaînes de télévision. A l’hôtel Shangri-La,
c’est le service relations étrangères de la mairie qui prend les choses en
main. Les journalistes témoignent d’une réelle curiosité pour notre raid,
les pays traversés, les meilleurs souvenirs…
Mondanités assurées – avec plaisir – nous allons pouvoir consacrer
nos dernières heures à Qingdao à
la visite de cette ville dont nous avons déjà appris qu’elle possède un
charme fou. La première étape est incontournable : c’est la brasserie de
la ville qui porte le nom de Qingdao – orthographié Tsingtao – à travers
le monde entier. La qualité de sa bière et son dynamisme en ont fait en
effet le huitième brasseur au rang mondial ! En 1898, les Allemands –
qui, comme toutes puissances européennes traînent dans le coin – se
fâchent. A Qingdao, on a assassiné deux de leurs pasteurs. Pour éviter
une guerre hasardeuse, les Mandchous, maîtres des lieux à l’époque,
accordent une bail de 99 ans aux Allemands qui s’installent donc dans
cette jolie rade bien protégée et y bâtissent une ville dans le plus pur
style bavarois et qui constitue aujourd’hui encore le cœur de Qingdao.
Occupée par les Japonais pendant les deux guerres mondiales, Qingdao,
contrairement à d’autres villes, ne sera pas détruite. Parce
qu’elle possède un véritable trésor : une brasserie,
créée de toutes pièces par les Allemands. Grands
amateurs de bière, les Japonais la maintiendront
en activité chaque fois qu’ils occuperont la ville.
Et les Chinois respecteront toujours cet héri-
tage germanique et sauront le faire prospé-
rer. Aujourd’hui, un musée de la bière a été
aménagé aux portes de la brasserie moderne
et reçoit des milliers de visiteurs. N’allez pas
imaginer que tout cela sent l’artifice. La bière
– légère et savoureuse - est vraiment la bois-
son incontournable de la ville et est servie sur les
meilleures tables.
Extrait du carnEt dE routE >>>>> >>>>> >>>>> >>>>>
26 juin-1Er juillEt. ErEnhot-Pékin-QinGdao
JAMAIS AU
TERME D’UN RAID
NOUS N’AVIONS
CONNU UN TEL
ENThOUSIASME
POUR SALUER
NOTRE ARRIVéE
A Qingdao, quelle n’est pas
notre surprise de buter sur
une banderole de bienvenue
déployée en notre honneur.
En bas, à Qingdao, même les
plaques d’égoûts évoquent la
bière locale !