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Salaün

Magazine

| Page 57

reportages

d

ici

et

d

ailleurs

|

cuba

de moyens de communication pour les échanges, Trinidad

a longtemps vécu sur elle-même, se reconstruisant au gré

des luttes et aléas... pour aujourd’hui nous offrir un visage

préservé et enchanteur.

Le mieux est de se laisser guider selon son inspiration au

départ de l’église de la Santisima Trinidad sur la Plaza Mayor,

le centre historique de la ville. Quelle que soit la rue que vous

emprunterez, les façades colorées d’orange, jaune ou rouge,

avec leurs longues grilles de fer forgé aux fenêtres, donnent

toute sa luminosité à Trinidad. Les plus belles maisons des

anciens planteurs et sucriers sont restaurées pour abriter,

parfois un commerce, un restaurant, et souvent un musée.

À l’angle de la Calle Desengano et du Callejon de la Pena, im-

possible de manquer le Palacio Cantero. L’ancienne demeure,

musée municipal depuis 1980, donne à voir un intérieur ty-

pique, dans ses meubles et sa décoration, de la bourgeoisie

sucrière du

xix

e

 siècle, friande de références à l’Europe pour

se différencier des autochtones. Mais c’est vers sa tour carrée

que l’on se précipite pour, au terme d’escaliers, jouir de la

plus belle vue sur toute la ville et ses horizons de montagnes,

de champs et de la mer scintillante sous le soleil ardent. De

retour sur le plancher des vaches, ou plutôt des chevaux ici,

direction la poterie de la famille Santander. Le travail de l’ar-

gile fait partie de l’histoire de la ville, et dans cet atelier, le

plus réputé, un des potiers vous offrira à coup sûr une de ces

petites breloques qui, en rang sur fil, tintent au gré du vent

ou à l’ouverture d’une porte. Il pose un doigt sur la bouche en

signe de silence pour ce cadeau comme si vous étiez un visi-

teur privilégié, avec l’espoir que quelques pesos viendront

en retour tout aussi discrètement. L’ambiance terreuse nous

a donné soif. Pas d’hésitation, le café

La Canchanchara

nous

attend pour déguster le cocktail du même nom, un mélange

doux-amer, servi dans une chope en terre, d’eau-de-vie, miel,

citron, eau et une herbe secrète au son d’un orchestre de sal-

sa... au moins le 8

e

que nous croisons depuis notre arrivée. Et

nous en rencontrerons d’autres au long de cette balade toute

de splendeurs à travers les ruelles et places où des passants

s’improvisent danseurs à l’occasion. Maintenant, pour faire

couleur locale, une pause cigare s’impose avant de rejoindre

la voiture, auprès de laquelle nous attend Manuel. Ce soir, il

nous amène à 6 kilomètres de là, dans un restaurant familial

perdu dans un hameau, pour y déguster une belle langouste

sur barbecue. Bonne impression dès le seuil franchi : il y a

là essentiellement des Cubains, signe d’une adresse vraie. Et

quand Paquito prendra sa guitare pour entonner les chan-

sons incontournables de l’île avec sa chaude voix érayée au

Bacardi depuis presque 83 ans, son âge, comment ne pas

reprendre en chœur avec les autres convives ?

Quelques tomates, haricots, oignons, de la bière ou du rhum... et un point de

vente,

punto de venta

, mieux garni que les magasins d’État, s’improvise au coin

d’une rue par une fenêtre créée dans le mur de la maison.