Salaün
Magazine
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reportages
d
’
ici
et
d
’
ailleurs
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cuba
maître est devenu un restaurant d’État pour nourrir les visi-
teurs étrangers au son de la musique locale. Avant de mettre
les pieds sous la table, la petite pente offre un spectacle sur-
prenant : de chaque bord, des draps, nappes et dentelles d’une
blancheur de neige, épinglés sur des fils à linge, claquent sous
les coups de vent dans l’espoir de séduire l’acheteur en quête
d’un souvenir différent. Nous nous contenterons d’un nap-
peron, après âpre marchandage, pour marquer notre passage.
trinidad
À peine le puissant moteur de la Chevrolet ramené au silence
sur un parking, les bruits des chevaux, les vrais cette fois,
résonnent à nos oreilles. Trinidad, musée colonial à ciel ou-
vert, est le domaine des cavaliers. Au pas, souvent avec une
seconde monture tenue à la bride pour un futur compagnon
de trajet, ou au petit trot avec une carriole pour transporter
marchandises ou famille, les chevaux, et aussi mules et ânes,
font claquer leurs sabots et fers sur les pavés inégaux des
rues. Une vision d’un autre temps, mais quotidien d’ici, qui
ravit le visiteur de passage. C’est à son histoire, pas forcément
rose, que Trinidad doit d’avoir conservé un cadre original
qui en fait sans doute la plus belle ville de Cuba, avec, depuis
1988, un classement au patrimoine mondial de l’Unesco en
même temps que la vallée de Los Ingenios. Fondée en 1514
par Diego Velásquez de Cuellar, compagnon de Christophe
Colomb et à l’initiative de l’importation d’esclaves d’Afrique
pour suppléer les « Indiens », qu’il trouvait trop indolents
au travail, Trinidad aura vu passer quelques-uns des pires
massacreurs du
xvi
e
au
xx
e
siècle. Le terrible Hernán Cortés
y prépara, en enrôlant les paysans, son invasion meurtrière
du Mexique. Les pirates des Caraïbes et contrebandiers y éta-
blirent leur base pour leur méfaits sur les mers et sur la popu-
lation locale. Les riches patrons des sucreries y firent mener
une vie de douleur à leurs ouvriers. Et jusqu’aux années
cinquante, où partisans de Batista et de Castro ne lésinèrent
pas sur les exécutions sommaires. Loin de La Havane, isolée
derrière les hauteurs de la sierra del Escambray, dépourvue
Sur les pavés irréguliers de Trinidad, le cheval est roi, pour le transport, le simple déplacement ou le plaisir.